Images ralenties, musique trainante et voix-off, la première scène présente Jesse James. Bandit sanguinaire que l'Amérique de 1881 en mal d'aventure et s'embourgeoiseant peu à peu a transformé en héros.

Robert Ford l'idôlatre depuis sa plus tendre enfance. L'assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford nous fait vivre la dernière année du plus célèbre criminel américain, et nous montre comment Bob Ford, un gamin de vingt ans, devient son ami, avant de le tuer, d'une balle dans le dos.

C'est l'histoire de la fin d'une époque -et de la naissance du mythe far west. Et Dominik fait de son film un hommage nostalgique aux westerns d'antan. Si tous les canons du genre y passent (attaque de train, duel, chevauchée, saloons...), il n'y a plus rien d'épique et les héros semblent faner peu à peu.

L'attaque du train est une illustration magistrale. Pas de fusillade, le train s'arrêtent doucement dans un nuage de vapeur. Autour, les bandits masqués ressemblent à des fantomes, des ombres dans la nuit qui détroussent des voyageurs plus incrédules qu'apeurés.

Cette scène et beaucoup d'autres dégagent une certaine poësie, renforcée par les choix esthétiques de Dominik.

La bande originale lancinante, triste, amère est un régal. Les plans quasi-fixes, les ralentis, les flous[1] transportent tandis que les couleurs froides et bleutées surprennent. Il faut dire que L'assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford[2] ne se passe pas dans les canyons rougeoyants de John Ford ou Sam Peckinpah, ni dans le désert jaunâtre d'Ennio Morricone. Non, Andrew Dominik nous entraîne dans des forêts grisâtres et des plaines enneigées.

Dosage subtil, l'ambiance est parfaitement posée. Film lent -peu de paroles et peu de musique- porté par des acteurs excellents. Brad Pitt qui passe en un instant d'une attitude de tueur à une fragilité de gamin (quel regard !). Et Casey Affleck tout en subtilité (quel regard !!). Même les seconds rôles valent le détour, Sam Rockwell[3] en tête.

On regrettera tout de même certaines longueurs, lorsque Dominik se concentre sur des personnages secondaires -voire ternaires-, et le recours au narraeur qui se contente de raconter ce que l'on voit à l'écran. Dommage.

L'assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford. A voir en se laissant porter...

Notes

[1] Le caméraman a découvert l'effet déformant du verre de mauvaise qualité -et oui, en 1881, le verre était moins travaillé qu'aujourd'hui- et s'est beacoup amusé.

[2] J'adore ce titre.

[3] Heureusemnt échappé de Galaxy Quest et Charlie's Angels.