C'est un mélange d'images d'archives[1] et de fiction. The Queen nous replonge dans la semaine qui suit la mort de Diana. Pas de bougie dans le vent, pas de portrait de Di. Très peu d'historique sur ses relations avec la famille royale. Ce qui nous intéresse ici, ce n'est pas la princesse, c'est la reine. Et accessoirement, Tony Blair.

La vie de la famille royale nous est décrite simplement, sans caricature. Frears filme la solitude d'une reine qui aime son peuple et ne le comprend plus. On la devine humaine, et boulversée par la mort de Diana, mais son éducation à l'ancienne et cinquante années de règne l'ont blindée. Elisabeth ne sait pas comment réagir. Elle voit le malaise de son peuple mais n'en mesure pas l'ampleur. Elle cache ses sentiments derrière le protocole. Et s'enferme peu à peu. Il y a cette scène où la reine se retrouve seule, perdue dans la campagne écossaise. De dos, d'un peu loin, en silence, Frears nous laisse deviner qu'elle pleure.

Il y a cette autre scène ou la reine rencontre son peuple, pour la première fois nous dit-on en voix off. Arrivant -enfin !- à Buckingham, elle passe entre la foule et les gerbes de fleurs. Les mots accompagnant les fleurs sont assassins pour la monarchie mais Elisabeth les lit, elle encaisse et de temps à autres, se retourne pour sourire à la foule. Une épreuve. Une petite fille lui tend un bouquet, c'est le début de la réconciliation.

Là où Sofia Coppola et sa Marie Antoinette étaient ennuyeuses, Stephen Frears dresse un portrait plus intense. Dans les deux films, on retrouve la même solitude des reines, le même poids du protocole, le même clash de deux univers mais la bouffée de modernité rend cette monarchie anglaise plus humaine. Cette épreuve nous la rend attachante. Ce qui n'empêche pas Frears d'être drôle. A l'anglaise. Férocement. Jamais parodique, il ne se moque pas de l'absurdité de ses personnages. Il ne juge pas, il témoigne. La mise en scène est simple. Peu de musique. Beaucoup de silences.

Quelques mots sur les acteurs : Helen Mirren[2] est épatante de sobriété, elle campe une reine digne, forte et humaine. Tout le monde ajoute qu'elle a su prendre la diction, la démarche et la gestuelle d'Elisabeth II mais pour juger de ceci, il faut être anglais ou Stéphane Bern. Michael Sheen joue un Tony Blair au sourire carnassier mais qui au fond de lui défend sa reine. Les autres personnages (le prince consort[3], la reine mère, Charles, Cherie Blair, l'assistant de Blair) sont plus tranchés -voire caricaturaux- mais c'est de l'ordre du détail.

Dernière remarque : la campagne écossaise autour du château de Balmoral a l'air superbe.

The Queen est un bon film. Pas une merveille, mais on passe un agréable moment.

Notes

[1] Le logo de CNN est partout.

[2] Ca fera plaisir à Fabrice, ça.

[3] Pour les grandes occasions uniquement.