Ce matin, j'étais à Bonnières sur Seine, charmante petite ville à la frontière entre l'Eure et les Yvelines. Les Bonnières-sur-seinois organisent un festival de théâtre amateur dans quinze jours - vous pouvez pas vous tromper, c'est en même temps que la braderie commerciale de l’UCAIB. Ils ont demandé à la compagnie On/Off d'assurer une animation / publicité pendant le marché hebdomadaire. Nous avons eu la faiblesse d'accepter. Il y avait Maya, Marie, Tatiana, Fredj et moi.

Jouer face à un public, ça n'est jamais facile. Dans un théâtre, les spectateurs y mettent du leur : ils sont consentants. Sur un marché par contre, les gens font leurs courses. Ils n'ont rien demandé à personne. Il faut donc capter leur attention - et la garder le plus longtemps possible. Plus facile à dire qu'à faire.

Sur le coup de neuf heures, nous débarquâmes place du marché à Bonnières. Il pleuvait. Ce genre de bruine normande pas méchante au premier abord mais qui vous a à l'usure. Il faisait froid. Pas énormément mais juste assez pour dissuader les gens de traîner dehors. Il n'y avait pas l'estrade qu'on nous avait promis. Bref, tout s'annonçait au mieux...

Nous nous dirigeâmes vers la salle des fêtes où nos hôtes nous attendaient. Très gentiment, ils nous offrirent du café et des croissants. Et s'excusèrent pour le temps - mais ça n'était pas leur faute. On discuta un peu. Il y avait le président de la troupe de théâtre amateur de Bonnière, M. Welcome - un fondu de théâtre qui, de temps en temps, finissait ses phrases en anglais, l'attachée clulturelle de la mairie - qui avait une double casquette : elle faisait aussi partie de l'équipe organisant le festival - et quelques autres personnes dont le régisseur - qui visiblement aurait préféré faire une grasse mat'.

Le régisseur nous sonorisa avec des micro casque HF - les mêmes qu'à la Star'Ac - qui étaient reliés au système de haut-parleurs de la ville. De toute la ville. Tout Bonnières a profité de nos délires... Après un court échauffement et essais micros (tu es sûr que toute la ville m'entend là ? - mais éteins ce truc !), nous passâmes à l'action.

Problème : il y avait peu de monde et les quelques présents étaient dispersés. Constatant qu'une annonce ne produisait aucun effet (Bonjour mesdames et messieurs, ce matin au marché de Bonnières sur Seine, le festival de théâtre amateur vous propose une animation... Pas un mouvement, pas un regard. Grand moment de solitude), nous allâmes jouer pour des petits groupes - parfois même pour une seule personne. Formule simple : nous demandions un mot à une personne et nous jouions une petite saynette de 2 à 3 minutes sans préparation. La plupart du temps, nous nous fixions des contraintes (rimée, chantée, zapping télé...), c'est plus impressionnant et ça distrait le public - il s'occupe moins de la qualité de la prestation.

Première impro sur le thème "sourire", nous attaquâmes énergiquement, la dame qui nous avait donné le mot nous surveillait du coin de l'oeil. Visiblement tiraillée entre la peur de se faire voler son cabas, la curiosité et l'envie d'acheter deux belles soles pas trop grosses. A la fin de l'impro elle nous félicita et partit...

Dans l'ensemble, les gens semblaient contents mais comme ils n'étaient pas nombreux, nous manquions de retour - nous avons eu parfois l'impression de jouer pour des volailles et des saucissons... Au bout de quelques temps, nous avons remarqué quelques personnes qui nous suivaient de loin : elles nous observaient à 8 - 10 mètres sans oser s'approcher.

Maya nous a fait un beau monologue sur la pluie et le changement climatique. Un type nous a demandé une impro sur les abeilles - c'est grâce à elles que nous pouvons manger 80% de ce que nous mangeons ; rendez-vous compte si les abeilles disparaissent, nous aussi ; on nous parle de réchauffement climatique, moi je vous dis qu'il faut sauver les abeilles - Fredj et moi en avons fait une comédie musicale (un enfant qui demande à son papa comment on fait les bébés). Tatiana et Marie ont enchaîné les annonces pour le festival de théâtre (il paraît que les filles, ça passe mieux)... A la fin de nos impros, on a eu droit à quelques applaudissements. Ouf.

Vers midi vingt, un peu après la sortie de la messe, nous rendîmes nos micros. Les gens du festival avaient l'air content. Ensuite, la mairie de Bonnières - pas rancunière, c'est peut-être bon signe - nous a invité au restau (je vous en parlerai dans un prochain billet, la canne à pêche vaut le détour).

Ces deux heures furent épuisantes et pas toujours gratifiantes. Mais ça nous a tous donné envie de recommencer. Enfin, au printemps...

On parle toujours d'Avignon... Plus tard, je pourrais dire que j'ai participé au festival Off de Bonnières sur Seine.