Partout on nous l'annonce. Les gondoles se remplissent de cartables, cahiers, crayons, effaceurs... Les librairies ressortent les manuels scolaires, les pharmacies vendent des produits dopant la mémoire. Les épiceries fournissent de l'énergie pour l'apprentissage, en barres... Bref, partout on nous l'annonce : c'est la rentrée scolaire !

Et bien non. Pas cette année ! La rentrée scolaire n'aura pas lieu. Qu'on se le dise.

Comment donc ? Avec tout ce tapage médiatique ? Es-tu aveugle, es-tu sourd ? Non point, et malgré tout, je persiste. Ah ah, c'est parce que tu n'es plus étudiant que tu dis que cette rentrée n'existe pas ! Certes, cette année, pour la première fois un mois de septembre je travaille mais non, je ne pousse pas l'égocentrisme à généraliser mon cas à moi : cette année, pour tout le monde, la rentrée n'aura pas lieu. Bertrand, tu te moques. Non, regarde par la fenêtre...

Qu'est-ce que la rentrée scolaire ?

C'est un changement d'état que ne renierait pas la thermodynamique. Sous une pression sociéto-parentale (appliquée via différents dispositifs psycho-mécaniques : réveil matin, achat de fournitures, recommendations pour la première journée...), l'enfant passe de l'état vacancier à celui d'écolier.

Vacancier, le jeune insouciant en culotte courte se lève tard, passe ses journées à gambader dans les prés avec les copains, sous une pluie de soleil estival. Jouer dans la nature[1] est un éveil quotidien, Chaprot observe les insectes, les plantes, il se couvre de terre et tâche ses pantalons d'herbe verte. Sa mère attendrie lui demande s'il s'est bien amusé. Le soir, Chaprot dîne dehors puisque le soleil se couche tard et lorsqu'enfin il[2] est couché, papa Chaprot et lui regardent les étoiles. Le temps est au rêve.

Ecolier, le jeune travailleur, cartable rempli de savoirs imprimés[3], se presse en rang par deux sous la grisaille d'un septembre qui s'annonce pluvieux. Une fois que le maître a fait entrer ses élèves dans la prison quotidienne aux trente pupitres sentant la craie, la peinture à l'eau et la colle cléopatre, Chaprot n'a qu'une seule consolation : songeant au bonheur perdu, il regarde par la fenêtre et il pleut. La plume sergent major coule et Chaprot songe aux gros yeux de sa mère ce soir qui verra les taches d'encre. Les néons cliquent au plafond. Dix heures du matin et déjà il fait sombre. Le temps est au regret.

Or cette année, la transition n'aura pas -n'a pas eu- lieu. En effet, cet été, le temps avait tout d'un mois de novembre. Pluie, froid, obscurité, vent... Ainsi, si Chaprot n'a pas pu être vacancier, comment voulez-vous qu'il devienne écolier ?

Cette année, la rentrée scolaire n'aura pas lieu, c'est bien dommage...

PS : que cela ne vous empêche pas d'aller jeter un oeil aux contributions de : Laurent, Olivier, Bergere, JvH, Jean-Marc, Lady Iphigénia, Julien, Isabelle, Christophe, Hibiscus, Alcib, Fred, Anne, Joël, Chantal, Loïc & Hyun-Jung, Marie, Looange, Anne B et Froggie.

Notes

[1] Pour les plus citadins d'entre vous, remplacer ce qui précède par regarder la télé...

[2] L'astre diurne.

[3] Le poid de la connaissance se compte en kilogrammes.