D'où venez-vous ? La plupart du temps, vous êtes Français. Mais avez aussi des points d'attache en Irlande, au Canada, Italie, République Tchèque... Vous fûtes un temps bosniaque, turc ou marocain mais là, moins.

Comment surfez-vous ? Si, les trois quarts du temps, vous interagissez avec votre ordinateur via les fenêtres de Redmont, il vous arrive aussi de taquiner le pingouin et même parfois le tigre. Peu friand de safari, vous préférez explorer sous firefox que naviguer sous explorer, mais entre ces deux là, votre cœur balance. Quant aux exotiques konqueror, epiphany et opéra, vous ne les utilisez que marginalement.

Que venez-vous voir ? Question complexe. Votre page préférée est l'index du blog et le billet que vous avez le plus lu est Rhinovirus puis viennent En écoutant la BO de Garden State et Transpacifik. Peut-être ne devrais-je plus parler que de pianistes jazz malades dans le métro. Notons au passage que vous notâtes quelques billets mais qu'une maladresse me fit tout effacer, il n'y a plus qu'à recommencer.

Pour ce qui est du reste du site (accueil exclus), vous allez souvent voir la photo du jour, la page nombriliste et la page contact -que vous utilisâtes pour me joindre lorsque vous ne me connaissiez pas d'avant (je ne devrais pas m'en étonner, cette page est là pour ça, mais tout de même, le premier mail envoyé par un parfait inconnu surprend).

Qu'est-ce qui vous attire ici ? Question délicate. Il arrive que vous veniez sur ce site parce qu'un moteur de recherche vous l'a indiqué. En ce cas, vous recherchiez le plus souvent : BO Garden state (à 20 reprises). Il semblerait que cette excellente BO ne jouisse pas d'une forte représentativité sur la toile. Tiens à l'occasion, je ferai une critique de ce film... Passons sur les bertrand ytournel blog pour nous pencher sur les requêtes étranges : l'histoire de la petite poule rousse, vends canari belge, personnality goes a long way ou encore Atukagawa, cafein de thé principe, guzmania feuille morte... Je crains que vous ne soyez souvent déçu par la réponse que ce site vous apporte.

Et pour finir, qui êtes-vous ? Question cruciale. L'humble auteur n'est pas dupe : la plupart des lecteurs réguliers -car il y en a- sont des amis. Le rusé auteur a même découvert qui se cache derrière les IP de certains. Parfois, ce fut facile, leur serveur (ex. total.argentine) ou pays (Canada, Irlande, Italie) ne laissant guère de doute. Parfois encore, c'est lorsque vous commentâtes que je vous reconnus. Parfois enfin, c'est votre ordinateur (ubuntu rules) qui vous trahit. Cependant, il reste que la moitié des visiteurs réguliers ne laisse en ces terres qu'une obscure adresse IP, et sont donc parfaitement anonymes. Quoiqu'il en soit, merci d'être là, car sans vous tout ceci n'aurait pas grand intérêt.

Cette longue introduction se termine, il est grand temps de se lancer dans ce que le titre -et la catégorie- du billet promettait. Penchons nous donc sur le cas d'un Lecteur exilé au Havre, utilisateur de Mac OSX.

En biographe consciencieux, l'Auteur a commencé par s'adresser à Charles K. himself, lui demandant ce qu'il aimait, ce que -étant petit- il voulait faire quand il serait grand, s'il avait des frères et sœurs et toutes ces sortes de choses qui permettent d'inventer des anecdotes invraisemblables (et propices au placement de subtils jeux de mots)... Je sais pas trop, improvise fut la réponse.

Dans la bouche de n'importe qui, cette réponse aurait trahi une flemme, voire une réticence à parler de soi, fort peu encourageante pour un biographe acharné. Mais pour Charles, c'est différent : c'était la seule réponse possible. Et -ce sera la thèse de l'Auteur- , cette réponse -Je sais pas trop, improvise- est l'essence même de Charles K.

Et si l'on parle d'essence, c'est évidemment pour introduire sa vie au Havre. Car -fans de Big Fish, vous seuls comprendrez- Charles est au Havre ce qu'Edward Bloom est à Hickville. Filons la comparaison car Big Fish lui va comme une panure à un carré de colin captain'iglo[1] : le défi dans une biographie de Charles K., ce n'est pas de broder sur sa vie -il le fait lui-même très bien-, mais bien de raconter le vrai, de souligner l'authentique (avé l'assent) et de toucher le fond. Ainsi :

Petit Charles était un enfant sage, peu démonstratif, voire réservé. Par dessus tout, il aimait qu'on lui raconte des histoires. Longtemps il s'est couché de bonne heure. Il se calait sous la couette et serrait un petit mouchoir tout doux contre sa joue. Son père s'asseyait sur le bord du lit et commençait à parler. L'histoire n'était jamais la même et son père imitait les voix des différents personnages. Charles ouvrait tout grand ses yeux et, pour ne pas perdre une seconde du récit, respirait aussi légèrement que possible. Chaque soir, il accompagnait les pirates sur l'île au trésor, sauvait la princesse des griffes du dragon et explorait la forêt vierge d'Amerzone... La nuit, il était heureux car il était quelqu'un d'autre.

Un jour d'octobre, il avait peut-être six ans, son père lui dit Charles, tu es trop vieux pour que je te raconte des histoires. Il faut t'endormir comme un grand maintenant. Comme si l'âge y était pour quelque chose. Profonde injustice. Et d'ailleurs son père ne regardait-il pas des histoires à la télé ? Incompréhension. Si seulement il avait su se révolter, ses parents en auraient entendu de belles...

Charles décida que, ses histoires, il les auraient malgré tout. Seul dans sa chambre, il commença à voix haute il était une fois un petit enfant très rusé qui vivait dans un monde où personne ne le comprenait... Son premier récit tenait à peu près la route -sauf peut-être lorsque le héros s'était retrouvé coincé par le méchant ogre, il n'avait rien trouvé de mieux pour l'en sortir qu'une bouche d'égout heureusement ouverte pour réfection des canalisations (ça tombait bien avait ajouté le héros, comme pour souligner ce décalage). Petit à petit, Charles inventa de nouveaux personnages, parfois puisés dans le réel et d'autres fois tirés de son imagination. Ses histoires se compliquaient et les rebondissements s'enchaînaient -une fois, il réussit même à se faire un petit peu peur. Il aimait maîtriser le récit, il avait le pouvoir de faire ce qu'il voulait de ses héros. Mais jamais il n'en abusait. A la fin, ceux-ci se mariaient toujours et avaient toujours beaucoup d'enfants (ou l'équivalent selon l'époque à laquelle se jouait la scène).

Cependant et comme il grandissait ce plaisir solitaire commençait à le lasser. Il se serait bien vu racontant des histoires à ses amis, à sa famille. A tout le monde. Un jour sa mère lui demanda ce qu'il voulait faire plus tard. Roi, comédien, président, ou éventuellement pompier... Et si vraiment ça ne marche pas, marchand de paniers. Ce fut la première manifestation extérieure de sa fantaisie, de son envie de raconter et de vivre des aventures hors du commun... Sa mère jugea qu'il avait de l'ambition et l'encouragea à travailler pour réussir. Charles profita de l'adolescence pour extérioriser. A l'âge où tout le monde a des complexes, lui se découvrit trop réservé. D'aucuns prétendent qu'il est tombé dans l'excès inverse, nous laisserons cette opinion à Fabien D. Depuis cette époque Charles parle beaucoup et très fort, ponctue ses phrases de oh ! ah ! et fait de grands gestes.

Et maintenant qu'il est grand, qui est-il ? Un vrai comédien : Charles est plusieurs personnages[2]. D'ailleurs, il fait de l'impro depuis Djibouti (il faudra que je détaille cette mémorable soirée à l'occasion). L'auteur aurait bien des choses à raconter sur l'épopée portavionesque mais ce qui s'est passé là-bas restera là-bas. Juste un mot, Charles y fut présentateur télé et y conçut l'idée Effet Kess Cool -la liste qui allait être élue au bureau des élèves de la promotion x2001. Depuis cette victoire par les urnes, la politique lui trotte dans la tête. Et il est du genre têtu...

Ségolène -sa charmante petite amie- a mis tant d'empressement à en parler que je ne crois pas trahir un quelconque secret en racontant leur rencontre. C'était à une soirée. Ségolène discutait avec l'ex de la sœur de Charles. Charles a commencé à la saouler de paroles. Je le trouvais super lourd. Il n'arrêtait pas de me parler mais impossible de savoir qui il était. Charles s'est présenté comme un banquier. Non comme un marin -il avait un manteau d'uniforme pour le prouver- qui travaille dans le pétrole. Ou plutôt comme un commercial. Enfin, comme un ingénieur qui veut faire de la politique. Avait-t-il précisé qu'il était comédien ?[3] Et Ségolène d'ajouter au bout d'un moment, je le laissais parler en me disant qu'il finirait bien par se lasser... Mais voilà que Charles réussit à la convaincre de le déposer chez lui après la soirée (c'est presque sur ton chemin - Tu parles, j'ai dû faire la moitié de Paris.). Au moment de partir Charles confie sa gabardine (attention, j'y tiens) à la demoiselle et s'en va dire au revoir. Le temps passe et le voituré se fait attendre. Je serais bien parti mais cette andouille m'avait filé son manteau, j'étais bloquée ! Il ne réapparaîtra qu'au bout d'une demi-heure. Après l'avoir déposé, je me suis dit que j'allais être tranquille mais deux jours après, il me téléphone, il avait piqué mon numéro dans le répertoire de l'ex de sa sœur. Tu vois le lourd. Il me lâchait plus... - Et alors ? - Finalement j'ai cédé. Par épuisement... Si cet épisode figure dans la biographie de Charles, ce n'est certainement pour souligner la pachydermie de sa méthode de drague mais plutôt parce que Ségolène lorsqu'elle racontait cette histoire avait un sourire de gamine qui partage un secret... Ce qui lui plait chez Charles (et de façon générale, ce qui plait chez Charles), c'est qu'il est entier[4].

La dernière facette du personnage se dessine ainsi. Pour ceux qui ont lu Giono, Charles joue comme l'artiste des grands chemins : toujours sur le fil du rasoir. On ne sait jamais s'il triche. Et d'ailleurs on s'en fiche jusqu'au jour où -la goutte d'eau qui fait déborder le vase- on finira pas croire qu'il a toujours triché... D'ici là, Charles restera insaisissable.

PS : commencé le 16 mai. Voilà un billet qui aura mis du temps à mûrir.

Notes

[1] Et d'ailleurs, il a des poissons (un combattant, un gourami, quatre barbus, trois veuves noires, un néon, un pleco, deux crevettes qui se cachent, deux chorydoras et un magnifique botia).

[2] Si jamais vous rencontrez l'ami Charles, livrez-vous à cette expérience amusante qui met en évidence sa multipersonnalité : posez lui une question ouverte. Vous observerez que Charles lorsqu'il explique ce qu'il pense se coupe lui même la parole afin d'exprimer ses différents points de vue. S'il y a plusieurs personnes dans l'assemblée qui lui posent des questions, un Charles différent répondra à chacune d'elles.

[3] Ce n'est qu'un peu plus tard que Ségolène allait comprendre que Charles était bien tout ça à la fois. Et qu'il n'était pas plus ingénieur que banquier ou marin. A tel point qu'il ne sait pas lui même qui il est (à part comédien)...

[4] UHT