Le spectacle venait de se terminer. Le public avait apprécié. C'était un de ces soirs où tout se passe bien. Dans les coulisses, nous étions joyeux. Vincent -l'oeil critique du soir- avait l'air content. Quelques impros un peu fouillies. La première était un peu molle mais ensuite, ça a décollé.

J'étais sur un nuage, en train de me changer, lorsque Fabien D. m'annonça qu'il avait lu mon blog -j'aurais du mal à lui en vouloir- et qu'il avait été déçu -il en fallait plus pour me gâcher la soirée, sans compter qu'après avoir lu çà, il était allé voir Syriana (petite victoire). Mais sans aller jusqu'à une remise en cause existentielle, cette remarque interpelle l'Auteur soucieux de plaire à son Lecteur.

Car si le Lecteur n'est pas content, il va lire ailleurs. Et l'Auteur se retrouve seul avec un éxcédent de production billetale (relative aux billets) à écouler. Drame, non seulement (mèn) ce genre de contenu n'est pas déversable devant une préfecture ou un ministère pour que le gouvernement prenne des mesures de soutien à la filière sinistrée, mais encore (dé) est-il vain de croire que le gouvernement pourra faire quelque chose. Si l'Auteur perd son Lecteur, c'est de sa faute. Sans compter que si l'Auteur perd son Lecteur, c'est qu'il n'en avait qu'un.

Pour garder son Lecteur, L'Auteur doit le séduire. Et pour séduire, il faut connaître. [1]

Parlez-moi de moi, il n'y a que ça qui m'intéresse.

Jusqu'à présent, l'Auteur a beaucoup parlé de lui -considérant qu'un blog n'est jamais qu'un journal intime public, une sorte de journal extime- il est grand temps qu'il parle un peu des autres. En l'occurence de Fabien D., qui inaugure une nouvelle catégorie : portrait.

En 1988, Fabien a 7 ans. Il habite à Hellemmes (le pays du H). C'est un enfant solitaire, bon élêve d'après madame Fontaine, la maîtresse de CE1, mais timide. Il ne parle jamais avec ses petits camarades et passe les récréations sous le préau, seul. Fabien n'aime pas les groupes, il a l'impression de ne pas être compris. Chez lui, Fabien passe des heures devant la télévision. C'est sa manière de s'isoler : il ne regarde pas vraiment l'écran mais laisse courir son imagination...

Sa maman s'inquiète de le voir si renfermé. Il n'a pas d'amis et la télé abrutit, c'est bien connu. Elle lui fabrique un petit frère (double stratégie : 1) tenir compagnie à Fabien et 2) en cas d'échec, le second sera peut-être normal), et Fabien exige une nouvelle télé. Elle organise des goûters avec les enfants du quartier, Fabien s'isole dans sa chambre. Elle récupère un canari (cause achat chat[2], céd canari BE TPS visi 59, poss recup cage et + si aff) chez ses voisins, Fabien s'en désintéresse.

Au bout de quinze jours, le canari meurt. Soudaine et brutale prise de conscience de l'implacable fatalité de ce monde ! C'est décidé, Fabien sera vétérinaire et combattra l'injustice animalière. Il commence par éteindre la télévision -qui était en veille- sauvant ainsi quantité d'ours polaires à jamais reconnaissants. Le petit Fabien voit grand : le cirque Pinder est de passage, il libérera les éléphants.

C'est alors que se produit le second choc dans la vie de Fabien : avant le numéro des éléphants, il y a deux clowns. Nez rouges. Gags. Rires. Larmes. Fabien découvre le monde du spectacle. Il est émerveillé. C'est décidé, il sera clown. Devant le miroir de la salle de bain, il se frotte le nez pour le rougir, fait des grimaces et prend des voix rigolotes. Petit à petit, il s'intègre aux groupes d'enfants et fait le pitre. Sa vie a désormais un sens : faire rire.

Adolescent, Fabien s'imagine acteur. D'ailleurs, il a un peu le profil de Tim Roth jeune... Chaque matin, il décide de son humeur pour la journée : il sera heureux, triste, énervé, fatigué, colérique, béat... et teste ainsi différents personnages. Ses amis le croient cyclothymique, il est secrètement comédien. Peu à peu, il afine sa répartie et développe son humour : mi monty pythons, mi robins des bois et mi molette (clef à). Si un tel concours existait, Fabien D. pourrait postuler au titre du roi du calembour.

Le 12 décembre 2001, Fabien mange chez mamie D. qui prépare un succulent boeuf bourgignon. Durant tout le repas, Fabien cherche le calembour (guignon), le jeux de mot ultime sur le nom de ce plat (le fameux jeux au plat). Et rien ne vient... Ecoeuré, il prend deux décisions : 1) ne plus jamais manger de boeuf bourguignon (sauf s'il est très bien fait et qu'il n'y a pas trop de sauce), 2) canaliser son humour sur une scène de théâtre. Il se lance alors dans l'improvisation théâtrale...

Le 24 mai 2002, travail de clown. Ce sera sa madeleine : Fabien renoue avec ses premières amours. Trop tard pour faire véto, le directeur des études à posé le sien. Tant pis, ce sera biologie moléculaire : synthèse parfaite de la biologie et du clownage.

Le ministère de l'agriculture, de la pêche et de la ruralité lui tend les bras, il s'y précipite. Aujourd'hui, il est à la recherche d'une thèse, dont le sujet pourrait être l'influence des jeux de mots sur les sécrétions endocrinales.

L'animal favori de Fabien : le chat (pitre) ; son apéritif favori : les cacahuettes...

Notes

[1] Il faudra que l'Auteur pense à installer un plugin de statistiques pour vous traquer, Lecteurs.

[2] Plusieurs théories s'affrontent pour l'interprétation de cette annonce. Etait-ce l'arrivée d'un matou ? Le canari déclenchait-il des crises d'éternuement ? L'Auteur pense quant à lui que l'annonceur essayait d'apprendre à danser le tcha tcha tcha et le piaf sifflait invariablement des fox trott...